BERNARD Samuel

Catégorie: Portraits
Année : 1726

 

P.1342

Âge du modèle : 75 ans

Huile sur toile
H. 265 ; L. 166. 
Versailles, musée national du château. MV7172

Historique :

Paiement inscrit aux livres de comptes en 1726 pour 7200 livres (ms. 624, f° 42 v° : « M[onsieu]r Bernard, en pied, avec une marine. [rajout :] Tout original ») ; coll. Forestier de Coubert ; acquis en 1947.

Bibliographie :

Hulst/3, p. 196 ; Mariette, 1740-1770, VII, f° 22 ; Brice, 1752, I, p. 469-70 ; Lelong, 1775, p. 145 ; Lescure, 1836-1868, III, p. 499 ; Demonts, 1909, p. 278 ; Roman, 1919, p. 201, 211 ; cat. exp. Toronto-Ottawa-San Francisco-NY, 1972-1973, n° 122, p. 202-203 ; Rosenfeld, 1981, p. 282, 283 ; Constans, 1995, II, p. 756, n° 4264 ; Brême, 2000, p. 51 ; Leribault, 2002, p. 48 ; James-Sarazin, 2003, p. 305, note 26, p. 323 ; Perreau, 2004, p. 192, 193, 195 ; Levallois-Clavel, 2005, I, p. 31, 88, 189,194, 256 ; ibid. II, p. 314-315, cat. P.-I. Dr. n° 25 ; Perreau, 2013, cat. P.1342, p. 274-275 ; James-Sarazin, 2016, II, cat. P.1423, p. 487-488.

Œuvres en rapport :

  • 1. Pierre noire, rehauts de blanc sur papier bleu, traces de mise au carreau. H. 55,9 ; L. 31,2 cm.  Signé et date en bas à gauche : « fait par Hyacinthe Rigaud 1727 ». Kansas City, The Nelson Atkins Museum of Art. Inv. 66.15. Hist. : Inconnu. ; Bibli. : Cat. Toronto-Ottawa-San Francisco-New York, 1972-1973, n°122, p. 202-203, pl. 63 ; Rosenfeld, 1981, p. 283, repr. fig. II ; Brême, 2000, p. 51, repr. ; James-Sarazin, (1999), 2003, p. 305, note 26 p. 323.
  • 2a. Gravé par Pierre-Imbert Drevet en 1729, dans le même sens que la toile. H. 61,9 ; L. 42,1 cm. Dans la bordure, en bas de l’estampe, de part et d’autre d’un médaillon aux armes :« Samuel - Bernard / Chevalier de l’Ordre de St - Michel, Comte de Coubert. » Plus bas, à gauche et à droite : « Peint par Hyacinthe Rigaud Chevalier de l’Ordre de St. Michel - Gravé par P. Drevet. 1729 ». Quatre états connus.
  • 2b. Gravé par François Chéreau en 1729.
  • 3. Esquisse préparatoire disparue dans l’incendie de l’hôtel de Paris en 1871, peut-être celle mentionnée dans la vente Collin de vermont en 1771 (fol. 10 : « [n°] 59 - Deux très petits Tableaux sur toile dont une Esquisse de Portrait en pied, de Samuel Bernard par M. Rigaud, l’autre une Tête de Vieillard, Ecole d’Italie. »)
  • 4. Esquisse chez M. Hédouin à Valenciennes en 1859.
  • 5. Esquisse en grisaille (attribuée à Rigaud) dans la collection Liechtenstein à Vienne selon Demonts.
  • 6. Huile sur toile d'après Rigaud (XIXe), H. 55 ; L. 42 cm. Vente Versailles, Perrin-Royère-Lajeunesse, 18 décembre 2011, lot. 16.

Copies et travaux :

  • 1726 : « Une copie de M[onsieu]r Bernard » pour 300 livres (ms. 624, f°42 v°).
  • 1726 : « Un dessein d’après son grand portrait » pour 200 livres (ms. 624, f°42 v°).
  • 1726 : « Une marine d’après le portrait de M[onsieu]r Bernard » par La Penaye pour 20 livres (1726).
  • 1734 : « Une [copie] de M[onsieu]r Bernard » pour 300 livres (ms. 624, f°44 v°). 

Descriptif :

Fils du peintre protestant converti Jacques-Samuel Bernard (1615-1687), Samuel Bernard (1651-1739), comte de Coubert était, depuis le 17 juin 1676, maître mercier grossier de draps d’or, d’argent et de soie de Paris, exerçant son négoce rue de Bourg-l’Abbé et devenant bientôt marchand banquier. Après 1685, bien que nouveau converti, il demeurera en liaison étroite avec les marchands, manufacturiers, dignitaires ou princes protestants d’Allemagne ou du nord de l’Europe. Cette proximité rendra son crédit personnel précieux, voire irremplaçable pour l’État, lorsqu’il s’agira de solliciter des pays protestants des prêts d’un volume considérable pour le service du roi de France. Samuel Bernard réussit à amasser une énorme fortune et, par ses avances, par son système de relations, il rendit de grands services à l’État. Anobli (1699), il acquit la baronnie de Rieux (1707) en Languedoc et subit de lourdes pertes en 1709. « Cependant, aucun particulier de cette espèce n’avait jamais tant dépensé ni laissé, jamais eu, à beaucoup près, un si grand crédit par toute l’Europe jusqu’à sa mort » nous avouera Saint-Simon. Bernard obtiendra le titre de conseiller d’État juste avant sa mort.

Les 7200 livres exigées par Rigaud pour son portrait furent justifiées par l’ampleur de la composition, entièrement originale et parfaitement spectaculaire. Très riche, Bernard paiera d’ailleurs en 1727 une copie du portrait du contrôleur général Le Pelletier des Forts[1] et, en 1728, une autre copie de l’effigie du cardinal de Fleury[2].

Germain Brice, dans sa Description de la Ville de Paris, mentionne la présence de l’effigie, sur les murs de la demeure du banquier, rue Notre-Dame-des-Victoires, non loin de l’hôtel de Pompone : « Samuel Bernard […] occupe dans la rue de Notre-Dame des Victoires, qui est dans le voisinage, une maison dont les dedans sont ornez avec bien de la magnificence. On y remarquera dans un sallon en maniere de galerie quatre tableaux de Jean-Baptiste de Troy, & le portrait du maître de la maison, de grandeur naturelle peint par Hyacinthe Rigault, avec un soin & un amour dont cet habile maître est presque seul capable. C’est ce même portrait qui a été gravé en 1730 avec un soin égal par Pierre Drevet fils. Samuel Bernard au milieu de ces grandes richesses se fait gloire d’être le fils d'un Peintre habile nommé comme lui, qui s’est particulièrement distingué par les beaux ouvrages peints en miniature qui font sortis de son pinceau ».

On pourra mentionner ici le lien profond existant entre Maurice Quentin de La Tour et Rigaud lorsque le premier est amené à confectionner son chef-d’œuvre en livrant vers 1739 un immense et splendide pastel du fils de Samuel Bernard, Gabriel-Bernard de Rieux (1687-1745), conseiller au Parlement de Paris à 25 ans avant de devenir, en 1727, président de la deuxième chambre des enquêtes jusqu’à sa mort[3]. Notons que le travail de La Penaye en 1726, consistant en une copie de la marine de fond, était peut-être destiné à illustrer le portrait de François de Castanier que Robert Gaillard grave en 1751. Le dessin de Kansas City, extrêmement poussé dans sa technique semble avoir été réalisé en vue de la gravure réalisée par Pierre-Imbert Drevet en 1729.

Le 19 novembre 1727, l’avocat Mathieu Marais signalait le portrait de Bernard dans une des ses lettres au président Bouhier[4] : « Rigaud a fait un portrait merveilleux de M. Bernard père, c’est un chef-d'oeuvre de l’art ; le Coustou en a fait un buste de marbre, autre chef-d’œuvre de son art, et le tout bien payé. On en veut faire graver aussi une estampe, et l’abbé Boutier, poëte latin, qui a senti de loin la récompense, a fait de son chef deux vers latins pour mettre au-dessous, vers impertinents et que j’aimerois mieux être faits par notre ami ; ces vers ont été rejetés, les voici : Providus hic urbem civis nutrivit egenam / Fruclibus, et patriae se probat esse patrem. » 

L’esquisse détruite en 1871 était peut-être celle mentionnée dans la vente Collin de Vermont en 1761, fol. 10 : « [n° ] 59 - Deux très petits Tableaux sur toile dont une Esquisse de Portrait en pied, de Samuel Bernard par M. Rigaud […]. »

Notons enfin que l'image du portrait de Samuel Bernard connut diverses fortunes auprès d'autres artistes, à l'instar du portrait dit d'un magistrat peint par le frère Damien Carpentiers (actif au XVIIIe siècle) en pendant d'une effigie de son épouse, inspirée de celui de Marie de Laubespine (morte en 1677), peint 40 ans plus tôt par Largillierre (et connu par sa gravure de Pierre Drevet en 1695-1697).

 


[1] « Une Copie en grand de Mr le Controlleur general pour Mr Bernard » pour 1500 livres (ms. 624, f°42 v°), Roman, p. 202.

[2] 300 livres, Roman, p. 203.

[3] Los Angeles, The J. Paul Getty Museum.

[4] Lettre 18e, Journal et mémoires de Mathieu Marais, avocat au Parlement de Paris, sur la régence et le règne de Louis XV (1715-1737) : publiés pour la première fois d'après le manuscrit de la Bibliothèque impériale.... Tome 3 / avec une introduction et des notes par M. de Lescure, p. 499.

 

 mise à jour 27 novembre 2016.

Localisation de l´œuvre :

Versailles, musée national du château, France

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Autoportrait de Hyacinthe Rigaud. Coll. musée d’art Hyacinthe Rigaud / Ville de Perpignan © Pascale Marchesan / Service photo ville de Perpignan